Il y a des œuvres au titre évocateur, qui sonnent comme des promesses. L’album dont il sera ici question fait encore mieux : il tient sa promesse.
Une fois n’est pas coutume, j’ai connu And So I Watch You From Afar (qu’on abrègera par la suite ASIWYFA parce que bon) grâce au sieur EGN et à son podcast (dont je vous avais déjà parlé ici). Rendons à César ce qui lui est dû, parce qu’il m’a permis de découvrir mon album préféré à ce jour.
N.B. : je conseille fortement la première écoute de cet album en un seul tenant, les morceaux ne se dissociant pas forcément les uns des autres. Je les détaillerai dans le reste de cette chronique, mais vous trouverez en bas de page un lien d’écoute pour l’album en entier.
Il n’existe pas vraiment de genres de musique auxquels rattacher ASIWYFA. Ou plutôt si, il en existe, mais ils ne font pas ressortir ce qui rend la musique de ce groupe si particulière. Pour la décrire, je me contenterai donc d’un « rock instrumental optimiste ». Comme je le disais en phrase d’introduction, cet aspect est clairement énoncé par le titre de l’album : « All hail bright futures« , littéralement « vivent les futurs radieux » en français. Vous n’y croyez pas ? Alors commençons par le début.
Le disque débute par une petite mélodie qui monte, qui monte… Jusqu’à la première décharge. Un torrent d’énergie qui semble nous emporter jusque très haut dans le ciel (au dessus, c’est le soleil). Ne vous inquiétez pas, ce ne sera pas le seul. Après un petit répit accordé par les quelques chœurs, on repart de plus belle.
Big thinks do remarkable s’achève et on se demande comment le groupe va bien pouvoir tenir le rythme pour le reste de l’album après une apothéose pareille. Heureusement, Like a Mouse rassure assez rapidement. Un morceau qui donne une envie irrésistible de sauter n’importe comment, sans même se préoccuper de l’atterrissage (à écouter dans un environnement dégagé donc).
Arrive ensuite Ambulance et son utilisation de la double pédale qui change un peu de ce qu’on peut entendre dans le metal en général, en l’utilisant ici plus pour appuyer l’énergie que pour donner un côté extrême ou rapide à la musique. Le morceau se termine par une petite mélodie nostalgique pour laisser place à la piste suivante.
The Stay Golden est divisé en trois pistes, mais le tout forme un ensemble magistral qui donne un sourire à toute épreuve. Avec ses trompettes, ses petits d’ambiances tropicales et ses quelques samples, ce titre évoque une myriade de sentiments et de souvenirs, mais jamais les mauvais. A la fin du titre, on est dans le même état qu’après une journée en compagnie de celleux qu’on aime : peut-être fatigué.e, mais satisfait.e et encore plein.e d’euphorie.
Mend and Make Safe, c’est l’exemple type du pouvoir de la batterie. Des parties pas si simples mais au groove exceptionnel et cela tout du long du morceau. C’est pas pour rien qu’il commence avec le poum-tchac tout seul ou presque.
On arrive à Ka Ba Ta Bo Da Ka. Bon, là on comprend pas trop ce qui se passe, on en a partout dans la stéreo, on envie de taper du pied et de bouger du popotin sans que l’on sache bien pourquoi. Et puis ça arrive. Vous vous souvenez quand j’ai dit que le disque était bourré de montées et de décharges ? Eh bien là, c’est à mon avis une des plus belles que j’ai pu entendre. La décharge donne des frissons. Le temps de s’en remettre et Things Amazing tombe comme une tempête electro-rock histoire d’en rajouter une couche. Fiou.
C’est l’heure du titre éponyme. Au programme : patates, mignonitude, jolie voix, trompettes et toujours cet incroyable optimisme. Un véritable soleil auditif.
Il est temps d’apporter une conclusion à l’album. Young Brave Minds s’en charge et va vous emplir d’une détermination à toute épreuve. Rien, absolument rien, ne se mettra entre vous et votre « bright future ». Tout obstacle sera balayé.
Vous aurez peut-être remarqué que mon descriptif des différents morceaux est très centré sur les ressentis et émotions et n’aborde pas beaucoup l’instrumentation. C’est qu’il est ardu d’en rendre vraiment compte. On pourrait essayer de rapprocher la musique de ASAWYFA du math rock*, mais si elle garde des harmonies assez proches de ce style, il n’y a pas cette complexité rythmique qui donne son nom au genre. De plus, le groupe explore plus loin que l’instrumentation classique du rock : outre les différents effets apposés aux guitares et à la batterie ici et là, on peut noter l’utilisation de trompettes et de mélodies un peu exotiques. Il y a aussi une alternance entre des alternances rapide/lent avec des passages à la blanche permettant de poser un gros groove, un procédé qui est souvent utilisé dans le punk hardcore et dans le metal (les fameux breakdowns* par exemple) mais ici dénué de toute violence.
Bref, ce disque est un peu un OVNI. Et pourtant, il a tout ce qu’il faut en talent de composition et talents des musiciens. Il est aussi bien une promesse qu’un remède : je peux vous assurer que si vous êtes angoissé.e, avez un coup de blues ou bien empli.e. de doutes l’écoute de ce disque vous fera allez mieux. Mais je suis certain qu’après l’avoir entendu, vous serez du même avis.
*Quelques détails en plus à propos des styles mentionnés :
- le math rock est un genre de rock souvent instrumental qui se caractérise par une certaine complexité, que ce soit au niveau rythmique (polyrythmie, signatures rythmiques inhabituelles…) que mélodique (en piochant dans des accords de jazz par exemple). Voici une vidéo de la chaîne Kronomusik qui présente rapidement ces caractéristiques.
- les breakdowns sont des structures que l’on retrouve souvent dans le punk hardcore depuis les années 90 et dans beaucoup de genres de metal influencés par cette scène punk. Il se présente souvent comme un moment plus lent et davantage basé sur le rythme que le reste du morceau. Quelques exemples assez bourrins ici.